À l’occasion de l’anniversaire d’Erasmus+ pour l’éducation des adultes, et des 10 ans de la plateforme EPALE (Electronic Platform for Adult Learning in Europe), l’Agence Erasmus+ France / Education Formation a organisé, le 2 juin dernier, à Paris, une grande journée dédiée au développement des compétences des adultes. Au programme : échanges autour des grands défis du secteur, découverte des opportunités Erasmus+, et valorisation de projets européens inspirants.
« Former les adultes n’est pas un luxe. C’est une nécessité démocratique, économique et sociale. Dans un monde traversé par des transitions majeures, l’éducation est un levier d’adaptation et un moteur de transformation », a déclaré Nelly Fesseau, directrice de l’Agence Erasmus+ France / Education Formation, en ouverture de l’événement. Elle a également rappelé que la création du programme Grundtvig en 2000 — aujourd’hui intégré à Erasmus+ — a marqué une étape fondatrice dans la structuration du soutien européen à la formation des adultes.
« Le secteur de l’éducation des adultes apporte une véritable souplesse, permettant aux publics fragilisés de se remettre en mouvement, d’acquérir des compétences autrement, et surtout de reprendre confiance en leurs capacités à apprendre et évoluer », a souligné Hervé Jouanneau, directeur de la direction Orientation et Formation de France Travail. Alors que la loi pour le plein emploi de 2023 porte l’ambition d’un accompagnement renforcé des personnes en recherche d’emploi, l’opérateur public de l’emploi — récemment accrédité sur le secteur de l’éducation des adultes — a organisé, depuis fin 2023, quatre sessions de mobilité de deux semaines à Séville pour des demandeurs d’emploi de divers profils. « Onze ont déjà retrouvé un emploi, soit près de 30 % pour lesquels le programme a été bénéfique », a-t-il précisé. Face à ces bons résultats, France Travail souhaite développer les mobilités dans ce secteur, en plus des mobilités du secteur de l’enseignement et de la formation professionnels sur lequel il est accrédité depuis 2014.
Si la Commission européenne a triplé ses financements entre 2021 et 2025, « aujourd’hui, les fonds Erasmus+ dédiés au secteur de l’éducation des adultes ne sont pas consommés en totalité, en particulier pour ce qui touche aux projets de mobilité », a expliqué Marielle Gaudin, responsable du pôle formation et insertion des adultes au département promotion de l’Agence Erasmus+ France / Education Formation. En cause, une méconnaissance des opportunités, liée notamment à une familiarisation parfois difficile avec le vocabulaire du programme. « Les acteurs du secteur de l’éducation des adultes nomment leurs publics “usagers”, “habitants” ou “citoyens”, et non “apprenants”. Par ailleurs, la notion européenne d’“éducation des adultes” n’a pas de définition précise à l’échelle nationale », a poursuivi Marielle Gaudin. La responsable de pôle observe néanmoins une dynamique très encourageante, « avec un doublement des demandes de financement en 2025 ».
L’éducation des adultes regroupe les organismes publics, associatifs ou privés qui promeuvent l’inclusion et la diversité, la durabilité environnementale, l’éducation numérique ainsi que l’engagement et la participation civiques. L’Agence Erasmus+ France / Education Formation a récemment réalisé une cartographie du secteur qui a permis d’identifier cinq grands profils : les acteurs de l’insertion et de l’inclusion ; les acteurs de l’action sociale et de la santé ; les acteurs de la culture ; les structures de l’éducation populaire, et celles de l’économie sociale et solidaire (ESS).
Pour soutenir la montée en puissance du secteur, l’impact des projets financés sur les structures et leurs bénéficiaires a été présenté lors de l’événement. Les premiers résultats d’une étude, qui fera l’objet d’une Note de l’Observatoire publiée au début de l’été 2025, ont permis d’ébaucher un état des lieux des projets mis en œuvre dans le cadre d’Erasmus+ pour l’éducation des adultes. Confiée à n-clique, une agence de sociologie appliquée, elle porte sur un échantillon de 476 projets. « Les trois principales thématiques qui s’inscrivent dans le cadre des projets sont l’inclusion et la diversité (75 %), l’évolution des pratiques pédagogiques, de recherche et de gouvernance (59,4 %), suivies de la participation à la vie démocratique, les valeurs communes et l’engagement civique (43,8 %) », a détaillé Valentin Riboule, président cofondateur de l’agence n-clique. Par ailleurs, en tête des finalités poursuivies figurent l’acquisition de compétences par les bénéficiaires des structures (74,2 %), la découverte et l’échange de pratiques professionnelles européennes (61,7 %), ainsi que la création d’outils pédagogiques (60,2 %).
La plus-value des projets Erasmus+ pour l’éducation des adultes a également été illustrée par des exemples, à l’image d’un projet porté par la CAF du Finistère. « Dans l’objectif de renforcer notre soutien aux associations locales, nous avons misé sur l’éducation populaire, afin de comprendre de manière concrète ce que vivent les associations aujourd’hui, et notamment leurs modes de gouvernance et modèles économiques », a détaillé Chloé Jaguin-Noël, chargée de mission au pôle appui au pilotage de l’organisme.
24 agents volontaires répartis en deux groupes sont partis en immersion dans des structures belges et italiennes. « L’expérience a renforcé leurs compétences informelles, et nous a permis de développer des outils qui vont être mis en place dans le service d’action sociale du Finistère », a résumé la chargée de mission, avant d’ajouter : « Désormais plus aguerris, nous souhaitons nous positionner comme structure intermédiaire : prendre en charge la gestion administrative et financière des projets Erasmus+ pour permettre à des bénévoles et administrateurs associatifs désireux de découvrir de nouveaux modes de gouvernance, de partir avec nous. »
Disponible en 23 langues et dans 35 pays, EPALE, la plateforme collaborative des professionnels de l’éducation et la formation des adultes en Europe, compte près de 170 000 inscrits. Gérée par l’Agence Erasmus+ France / Education Formation et accompagnée par une équipe de six experts thématiques, elle fête ses 10 ans cette année et offre de nombreuses fonctionnalités :
Durant l’après-midi, une table ronde a permis de faire un focus sur le portage européen pour la formation et l’insertion des adultes. L’UE s’engage activement en faveur de ce secteur à travers des textes majeurs qui définissent des objectifs ambitieux a exposé Jacqueline Pacaud, chef de secteur à la direction générale de l’éducation, de la jeunesse, du sport et de la culture (DG EAC) de la Commission européenne : « le principal levier financier dont elle dispose pour soutenir cette dynamique est le programme Erasmus+ ». Dans ce cadre, le budget alloué au secteur de l’éducation des adultes s’élève à 1,5 Mds € pour 2021-2027, soit 5,8 % du budget du programme. Une augmentation significative par rapport à la précédente programmation destinée notamment à accompagner l’ouverture de la mobilité aux apprenants adultes, auparavant réservée aux formateurs.
« La forte croissance, ces dernières années, du nombre de mobilités chez les apprenants et personnels de l’éducation des adultes montre que les acteurs s’emparent des opportunités qui leur sont offertes. Simplement, il faut leur laisser le temps », a ajouté Jacqueline Pacaud, plaidant en faveur d’une nouvelle augmentation du budget pour la programmation 2028-2034 et d’une réponse adaptée aux ambitions portées par l’UE, notamment dans le cadre de l’Union des compétences.
Dans une approche inclusive de l’apprentissage tout au long de la vie, Brikena Xhomaqi, directrice de la Life Long Learning Platform (LLLP), qui regroupe des réseaux d’acteurs européens de l’éducation et de la formation, a souligné l’importance de reconnaître tous les environnements d’apprentissage, qu’ils soient formels, non formels ou informels. « Notre réseau défend l’idée que l’éducation non formelle et informelle, portée en Europe par de nombreux acteurs, correspond mieux aux besoins de certains apprenants, en particulier les adultes », a-t-elle déclaré. Mieux adaptées aux personnes ayant mal vécu leur formation initiale, ces modalités d’apprentissage « offrent un cadre plus motivant et sécurisant pour ce public », a-t-elle fait valoir.
La journée s’est conclue par une présentation de l’appui offert par l’Agence Erasmus+ France / Education Formation aux structures désireuses de s’engager dans un projet Erasmus+ pour l’éducation des adultes. Il a été rappelé que les équipes sont à leurs côtés à chacune des étapes de la vie d’un projet, de la candidature au rapport final, afin que leur expérience Erasmus+ soit pleinement réussie. « Vous n’êtes jamais seul quand vous vous lancez dans l’aventure Erasmus+ », a résumé Marielle Gaudin.
Porté par une dynamique forte et un soutien solide, le secteur a ainsi toutes les cartes en main pour faire de l’éducation des adultes un levier structurant de transformation sociale, à l’échelle locale et européenne.